Le Yoga


Le yoga (sanskrit devanāgarī : योग ; « union, joug, méthode1», « mise au repos2 ») est l’une des six écoles orthodoxes de la philosophie indienne āstika dont le but est la libération (moksha) du cycle des renaissances (samsara) engendré par le karma individuel. C’est une discipline visant, par la méditation, l’ascèse morale et les exercices corporels, à réaliser l’unification de l’être humain dans ses aspects physique, psychique et spirituel3.

Le mot yoga se retrouve dans le Rig-Véda dont la composition remonte entre le xve siècle av. J.-C. et xe siècle av. J.-C.. Il n’y est toutefois pas employé au sens de la discipline spirituelle qui nous concerne ici, mais dans d’autres sens, tel qu’attelage, etc., bien que certains, comme Tara Michael, réinterprètent ces termes en ce sens4. Ce n’est qu’à partir de certaines Upanishads tardives, telle que la Shvetashvatara-upanishad qu’il est mentionné5. C’est entre le iie siècle av. J.-C. et le ve siècle que Patañjali codifie la philosophie du yoga en rédigeant les Yoga Sūtra, texte de référence et synthèse de toutes les théories existantes6.

Les quatre voies (mārga) traditionnelles majeures de yoga sont le jnana-yogabhakti-yogakarma-yoga et raja-yoga.

Le terme yoga est communément utilisé aujourd’hui pour désigner le hatha-yoga, même si cette discipline n’en est qu’une branche.

En 2014, l’ONU décrète le 21 juin « Journée internationale du yoga »7.

Étymologie

Le mot « yoga » (devānagarī : योग) est, dans la langue sanskrite, un nom masculin construit par adjonction à la racine YUJ- d’une voyelle thématique -a 8. Lorsque cette dérivation primaire s’effectue sur une racine portée au degré plein (dit aussi degré guṇa), elle fournit le thème d’un nom d’action généralement masculin. Portée au degré guṇa, la racine YUJ- devient YOJ-. Les lois phonétiques du sanskrit demandent de prononcer, dans certains cas, la palatale sonore j- sur le point d’articulation de la gutturale sonore g-9 .

Le radical YUJ- devient donc YOG-. Ce radical provient du mot Indo-Européen *yugóm, lui-même dérivée de la racine *yeug-. En Indo-Européen comme dans la plupart des langues filles, ce mot a gardé son sens originel de joug (par exemple : yukan en hittite, iugum en latin, یوغ en persan, etc.)10YOG- permet ensuite différentes dérivations primaires, dont celle du thème nominal yoga-.

Toutefois, dans le recueil paninéen des racines verbales, le dhatu-patha, une autre racine YUJ est donnée, signifiant « repos » (samadhi), c’est celle-ci qui est retenue par le commentateur Vyasa2. Comme l’affirme la définition du Yoga-sutra : « le yoga est l’arrêt (la mise au repos) des mouvements du mental »11

Sémantique

La racine sanskrite YUJ- signifie « atteler, unir1 » ou encore « reposer, arrêter2« . Le mot « yoga » a, en autres (le champ sémantique est très large) en sanskrit, les sens suivants : « 1) action d’atteler ; 2) méthode pour dresser les chevaux ; 3) mode d’emploi, technique ; 4) discipline spirituelle ; 5) râja-yoga ; 6) hatha-yoga ; 7) état d’union ou d’unité de l’être subjectif avec le suprême (selon Shrî Aurobindo) »12.

Sous l’influence (entre autres) du vedanta de Shankara, cette racine sera réinterprétée au sens d' »union » entre l’atman et le brahman, alors qu’à l’époque du Yoga-sutra, dualiste, il s’agit au contraire de désunion, la monade spirituelle (purusha) devant s’affranchir définitivement du monde2.

Yogi

Naga Sadhus (Sadhu nu) en Inde 2013

Du point de vue hindou, un yogi (sanskrit IAST : yogī) ou yogin (au féminin, yogini) est un ascète pratiquant le yoga qui peut être un samnyâsin, un sādhu ou un guru. Le terme ne désigne pas une fonction mais une forme d’engagement spirituel ; il est également utilisé dans le bouddhisme13 pour désigner celui qui se consacre à l’entraînement mental14.

Histoire

Article détaillé : Histoire du yoga.

Antiquité

Bhairava, Shiva sous sa forme terrifiante.

Dans les années 1920, une équipe d’archéologues dirigée par John Marshall découvre des ruines sur les bords de l’Indus (Pakistan actuel) de la cité de Mohenjo-Daro qui aurait été fondée trois mille ans avant notre ère. Parmi les objets mis au jour lors de ces fouilles, des sceaux illustrés d’un personnage assis en tailleur laissant songer à une posture (asana) du hatha-yoga ont provoqué un débat, sans qu’il y ait la moindre certitude à ce sujet, sur la possibilité que le yoga ait existé à une époque très reculée bien antérieure à ce que l’on croyait, dans la civilisation de l’Indus-Sarasvati15.

Selon la thèse de l’invasion aryenne, vers le xviie siècle av. J.-C., les Aryens auraient envahi le Penjab16, amenant avec eux leur civilisation codifiée dans les Veda, racine de l’Hindouismeauquel se rattachera le yoga. Ils s’imprègnent des traditions autochtones du Nord de l’Inde, notamment les pratiques yogiques, qui selon certains auraient existé originellement chez les Induséens17. Les archéologues et historiens actuels considèrent que l’assèchement de la Sarasvati, dû à des raisons climatiques, a obligé les populations de la civilisation de l’Indus à se déplacer vers l’Est. 
Pour les rituels de l’époque, « Prononcer la formule, consiste plus à déclencher une sorte de magie vocale, plutôt qu’à énoncer une forme de vérité absolue18 ». Cette incantation très attentive se retrouve dans le mantra-yoga, et l’attention au geste se retrouve dans les mudrâ, positions codifiées et symboliques des mains. L’immense majorité des indianistes considère toutefois que le Véda date du xve siècle av. J.-C.

Vers le viie siècle av. J.-C., les Upaniṣad forment le troisième et dernier groupe scripturaire de la révélation védique. L’élan métaphysique franchit ici le cercle restreint de la liturgie et, d’équivalences en équivalences, s’élève jusqu’à la vérité suprême19 : l’identité de l’âme individuelle (ātman) et de l’âme universelle (brahman)16, thème qui sera repris un millénaire plus tard dans l’acception védantique du yoga.

Vers les ive siècle av. J.-C. les Yoga Sūtra (Y.S.)20 et la Bhagavad-Gītā sont rédigés, ils deviendront les textes de référence du yoga.

Période contemporaine

Au début du xxe siècle le yoga réapparaît en même temps que le regain d’intérêt pour les spiritualités orientales. En 1924, Sri Tirumalai Krishnamacharia fonde une école de yoga qui va modéliser le hatha-yoga tel qu’il est connu en Occident.

Le yoga s’est lentement élaboré en s’imprégnant et en imprégnant ce qui l’entourait. Le yoga est avant tout une réalisation pratique (sādhana) obtenue par une ascèse engageant toutes les forces du corps et de l’esprit16 ; il s’apparente au Sāṃkhya par tous les apports théoriques qu’il y puise.

En décembre 2014, l’Assemblée générale des Nations unies adopte à 177 voix une résolution initiée par le Premier ministre indien Narendra Modi, (suivant l’inspiration de Sri Sri Ravi Shankar)21, invitant les pays membres à soutenir l’idée d’une « Journée internationale du yoga », le 21 juin, afin de « faire connaître les bienfaits de la pratique du yoga ». Le mois précédent Modi crée un Ministère du yoga en Inde (dont les prérogatives s’étendent aussi aux médecines traditionnelles indiennes : ayurvedaunani et siddha, incluant aussi l’homéopathie et la naturopathie)22,23.

Yoga sūtra

Article détaillé : Yoga Sūtra.

Écriture dévanagari.

Cette suite de 195 aphorismes fut codifiée aux environs du iie siècle av. J.-C. par Patañjali. Ils traitent de l’univers intérieur de l’homme et des moyens à mettre en œuvre pour se libérer de la nescience (अविद्या avidyā) entraînant la souffrance. Les Yoga Sūtra24 codifient la pratique du yoga en quatre chapitres :

  • Chapitre I, De l’unification25 : Samâdhi pāda.
Le premier sutra « Et maintenant voici l’enseignement du yoga »26 est interprété par les commentateurs comme faisant allusion à la chaîne de transmission maître-disciple. ce chapitre définit tout de suite l’objectif du yoga27 qui n’est pas sans surprendre les occidentaux habitués à ne connaitre que la pratique des âsana (postures) : pour Patañjali, il s’agit d’une cessation de l’agitation du mental28 qui stimule la souffrance et la confusion de l’égo pris pour le Soi29. Puis il indique les obstacles et les moyens pour les vaincre : finalement, il présente un modèle, et décrit les différents stades du samâdhi.
  • Chapitre II, Du cheminement : sādhana pāda.
Ce chapitre expose les causes de la souffrance et propose la discrimination comme moyen d’en sortir. Pour développer la discrimination, l’observance simultanée des huit directions de l’ashtanga yoga constitue les fondements de la pratique du yoga.
1- yama : pratiquer les devoirs moraux élémentaires envers les autres comme envers soi-même.
2- niyama : se discipliner et se mesurer dans la pratique quotidienne.
3- āsana : se tenir tranquille de façon stable ; Patañjali ne parle à aucun moment de position particulière ni assis ni debout.
4- Prāṇāyāma : devenir conscient de la respiration ; Patañjali ne détaille aucun Prāṇāyāma, et ne parle jamais de contrôle du souffle.
5- pratyāhāra : savoir séparer la perception sensorielle de l’objet perçu.
Ces cinq aṅga (membres) constituent les bases du hatha-yoga.
  • Chapitre III, Des pouvoirs : vibhûti pāda.
Description des trois derniers anga :

6- dhāraṇā : concentration, garder l’esprit concentré, fixé sur un point.
7- dhyāna : méditation profonde, fixer toute la saisie sensorielle au cœur de l’objet perçu (se reporter à méditation).
8- samādhi : contemplation profonde, percevoir les objets et événements hors de toute projection personnelle.
Puis ce chapitre évoque l’accès aux pouvoirs merveilleux (siddhi), et avertit que la quête de ces pouvoirs peut devenir une entrave.
  • Chapitre IV, De l’émancipation : Kaivalaya pāda.
Exposé du Karma et de la dualité, puis de la dualité vers l’unité. C’est une reprise approfondie de tous les thèmes déjà exposés vers le détachement ultime qui mène à la liberté.

Bhagavad Gītā

Voir l’article détaillé : Bhagavad-Gītā.

Le plan philosophique est complété par la Bhagavad Gītā. La Bhagavad Gītā aborde les différentes voies du yoga et leurs philosophies. Elle s’articule en dix-huit sous-chapitres, étant elle-même un des chapitres du Mahābhārata. Le verset 48 du chapitre 2 (Yogasthaḥ kuru karmāṇi « établi dans le yoga, tu peux agir ») constitue l’aphorisme central de la pratique du yoga.

Approche philosophique

Yoga dans la philosophie indienne

Article détaillé : Philosophie indienne.

Yogini, Tamil Nadu.

Le yoga est l’un des six points de vue (darśana) des philosophies indiennes āstika (qui reconnaissent l’autorité du veda). Ils fonctionnent par paires : nyāya et vaiśeṣikasāṃkhya et yoga, mīmāṃsā et vedānta. Ces darśana sont considérés comme essentiels pour obtenir une vue complète de la réalité. C’est en effet la juxtaposition de ces six voies de la connaissance qui permettrait de saisir l’ensemble « comme nous regardons une statue sous des angles différents avant de pouvoir nous en former une idée d’ensemble »30.

Au Sāṃkhya31, système dualiste et athée, le yoga emprunte de nombreux éléments théoriques dont : le Puruṣa32, la Prakṛti et les guṇa33.

« Celui qui demeure dans le champ de l’ignorance, est victime des cinq obstacles34 que sont l’ignorance, l’ego, l’attachement tout autant matériel qu’à ses propres idées, la répulsion et la peur de la mort35. ».

But philosophique en Occident

Le but du yoga selon la conception occidentale est la quête d’une harmonie, d’une unité corps et esprit. Pour Patañjali, c’est aussi la cessation des modifications du mental (citta), sources du karma. Cet état s’inscrit dans l’instant présent, et est potentiellement accessible à tout être humain. « Au cœur du yoga il y a un message important : tout être humain est naturellement équilibré et entier car le Soi 36 ne peut être ni détruit ni endommagé. C’est là notre nature inhérente, et le yoga est la voie vers une plus grande conscience de cette entité intérieure, le Soi »37. « Lorsque nous suivons systématiquement la voie du yoga, il prend dans notre vie une importance profonde. Intérieurement, il nous permet d’agir conformément à nos besoins, à nos intentions et aux valeurs qui nous sont les plus chères. Extérieurement, il nous apprend à renforcer notre corps, à détendre et à équilibrer notre système nerveux et à trouver la paix et la concentration sur un objet. En fin de compte, on dit que le yoga mène à la réalisation directe de notre nature véritable »38. »

Le yoga est une philosophie sans exclusivité : toutes les convictions, même religieuses ou humanistes, peuvent y trouver leur compte. Pour autant, le yoga n’est pas une religion. Le yoga propose l’union, les choix religieux39 ou non40 demeurant respectés. L’essentiel est la cessation des perturbations du psychique : le respect d’autrui, la paix et la non-violence (ou Ahimsâ).

Pratiques

Il existe de nombreuses voies et styles de yoga liés aux différentes aspirations individuelles et aux divers aspects de notre nature. Quatre voies traditionnelles majeures résument ces directions.

Au sein d’une même voie (मार्ग, mārga), il peut exister des courants différents. Un yogi reconnu comme maîtrisant parfaitement un mode d’enseignement peut décider de fonder une école de yoga. Cette diversité n’est pas un signe de faiblesse ou de dissension, mais plutôt une réponse à l’extrême diversité des attentes de chacun.

Le yoga n’est pas une pratique élitiste et s’adapte à chaque pratiquant. Dénué de tout esprit de compétition et d’objectif à atteindre, n’importe qui peut s’y adonner, quel que soit l’âge, l’état, la religion, malade ou bien portant etc.41,42

En 2017, la France compte ainsi près de 2,5 millions de pratiquants. Longtemps considérée comme une discipline féminine et pratiquée essentiellement par les séniors, le yoga se démocratise et attire de nouveaux pratiquants chaque année43.

Quatre voies traditionnelles

Quatre voies traditionnelles majeures, peuvent résumer ces directions. Il est possible de les suivre assemblées ou séparément :

  • le jnana yoga, la voie d’un yoga dont le but est d’atteindre la connaissance transcendante ;
  • le bhakti yoga, la voie d’un yoga de dévotion ;
  • le karma yoga, la voie d’un yoga de service et d’action désintéressée. Ces trois yogas ci-dessus forment le trimarga, ou voie vers l’éveil. Il existerait une voie qui regrouperait ces trois ascèses en une et qui leur serait antérieure. Cette voie, le madhyama marga serait la source de la voie du milieu dont s’inspire le bouddhisme et le zen[réf. nécessaire] ;
  • le rāja yoga, une voie de yoga s’inspirant des yoga sutra codifiés par Patañjali, cette voie de yoga procède essentiellement par méditation (dhyâna). Il est également considéré comme le yoga « intégral » ou « royal »associant les trois yogas précédents au Hatha-Yoga44.

Voies de kriyā yoga

Une citation de David Frawley décrit comme suit le kriya yoga : « la science yogique possède sa propre technologie consistant en diverses méthodes et techniques impliquant le corps, la respiration et le mental. Kriya se réfère à l’action, au processus ou au mouvement, en particulier au déploiement interne du prana et à la concentration. La purification et la transformation issues des yogas techniques préparent ainsi à la méditation profonde45. » Le haṭhayoga, le mantrayoga et le tantra yoga sont trois formes répandues de kriyāyoga.

Haṭha yoga

Articles détaillés : Hatha-yoga et Liste de postures de Hatha Yoga.

Posture de hatha-yoga : l’iguane.

Pour une majorité d’occidentaux, le yoga se résume au haṭha yoga. Pourtant, non seulement ce n’est pas la seule forme de yoga, mais même, la forme proposée en Occident est très éloignée de ce qu’est réellement le hatha yoga traditionnel. En effet, le haṭha yoga, traditionnellement, n’est pas une forme de gymnastique douce mais une voie spirituelle à part entière, qui plus est une voie abrupte et dangereuse réservée à une élite d’individus prêts à brûler les étapes de la réalisation.

Le terme « haṭha » (हठ), signifie vigueur, violence. D’un point de vue symbolique, cela exprime aussi la réunion heureuse des contraires, que l’on retrouve dessinée dans le praṇava, (प्रणव), la syllabe sacrée om  (le croissant lunaire accueillant le point solaire). D’un point de vue technique, le haṭha yoga est une discipline d’harmonisation et de développement des facultés psychologiques (concentration, sérénité) et corporelles (puissance et souplesse) poussés à leur perfection. Les principaux ouvrages qui présentent cette méthode, développée à la fin du premier millénaire de notre ère dans la secte tantrique des Goraknath, sont la haṭhayogapradīpikā et à la gheranda samhitā.

Mantra-yoga

Japamala.

Le mantra est un objet ou un support de méditation. Le mantra est soit une formule sacrée d’invocation condensée, soit une série de syllabes assemblées en fonction de leur seule efficience magique intrinsèque, répétée de nombreuses fois suivant un certain rythme. Le but de sa pratique peut être un bienfait matériel ou spirituel. Le mantra yoga peut s’effectuer dans le cadre d’un rituel minimal, ou d’une liturgie élaborée, incluant prières, visualisations, mudrāetc. Le récitant s’accompagne souvent d’une mālā, sorte de chapelet comportant 108 grains. Le mantra yoga s’identifie en bonne partie avec le siddha yoga. Sous une forme plus aisée et populaire il s’assimile au japa yoga, yoga fondé sur la « récitation » du nom de la divinité, répété mécaniquement, ou sur un mantra.

Tantra-yoga

Le tantra yoga s’exprime au travers de deux religions : le bouddhisme tantrique46 (Tibet, Bhoutan, Népal, et Japon) et l’hindouisme tantrique (principalement au Nord de l’Inde). Pour l’hindouisme, Tantra (तन्त्र) signifie : règle, méthode, traité. Le Tantra est une approche de l’énergie à un niveau subtil.

Plusieurs yogas puisent leur origine dans le tantra, nous en citerons deux : Le shivaïsme du Cachemire et le kuṇḍalinī yoga.

Shivaïsme du Cachemire
Article détaillé : Shivaïsme du Cachemire.

Mont Kailash, demeure mythique de Shiva.

Ce yoga est l’expression la plus aboutie du Tantra, il se fonde sur la triple autorité, tout d’abord des écritures sacrées, les Āgama, puis de l’expérience et de l’enseignement du maître, enfin du propre discernement du pratiquant. À la différence du Brahmanisme classique, le Shivaïsme du Cachemire n’exige aucune qualification particulière de caste, de foi, mais seulement une aspiration à s’initier, selon son aptitude, à un enseignement approprié. Seuls ferveur et désintéressement sont requis, aucune forme d’ascétisme douloureux, aucun mépris des sens ou de la vie courante47. Entre le VIe et le xe siècle, VasuguptaAbhinavaguptaGauḍapādaKshemaraja rédigèrent les œuvres majeures Cacheméries.

Kuṇḍalinī yoga

Les sept chakras.

Article détaillé : Kundalini yoga.

La kuṇḍalinī désigne l’énergie primordiale présente en chaque être humain et évolue en Sushumnā, son canal principal situé le long de la colonne vertébrale, à travers des chakra jusqu’au sommet de la tête. Cette technique permet l’équilibration puis la conjonction des courants ascendants et descendants du corps circulant au travers des principaux canaux énergétiques (nādî) gauche (idā) et droit (Piṅgalā). Certaines écoles de Hatha-yoga y puisent de larges emprunts, notamment leurs représentations énergétiques du corps.

Jung poursuivit, tout au long de sa vie, une analyse de la psychologie humaine et tenta entre autres, un rapprochement entre pensée orientale – Kuṇḍalinī yoga – et théories psychanalytiques. Fondamentalement, la psychanalyse est une « praxis« , une méthode empirique, dont les modèles théoriques émergeront précisément avec les débuts de Jung dans le mouvement psychanalytique (définition d’un « complexe »). Le yoga fournira une justification facile de ces modèles qui ne sont ni psychanalytiques ni yogiques, et permettra de recycler la quasi-totalité des modèles judéo-chrétiens.

Aleister Crowley se serait inspiré du kuṇḍalinī yoga en contrepoint justement de la définition jungienne.

Traditions de yoga non hindouistes

Bouddhisme et yoga

Mudrâ bouddhiste.

Le yoga possède des éléments communs aux croyances et pratiques religieuses des religions dharmiques48. La forte influence du yoga est perceptible dans le bouddhisme, notoirement par ses austérités, exercices spirituels, et états de transe49,50. La méditation dhyāna propre au bouddhisme est la pratique qui se rapproche le plus du yoga.

Cittamātra

Cittamātra (sanskrit), « rien qu’esprit », est l’une des écoles du bouddhisme mahāyāna. Elle est parfois nommée vijñānavāda, voie de la conscience, vijñānaptimātra, la conscience seule, ou encore yogācāra, pratiquants du yoga.

Shingon

Le Shingon est une école bouddhiste vajrayâna japonaise, fondée au viiie siècle par le moine Kûkaï (空海). Il s’agit donc de fusionner son esprit avec Maha Vairocana le bouddha cosmique en japonais « Daïnitchi-Nyoraï » par la réalisation des trois mystères « traïguya-yoga », celui du corps, de la parole, et de la pensée. C’est-à-dire d’effectuer simultanément un geste symbolique avec les mains, une mudrâ, répéter un mantra et de se visualiser comme la divinité bouddhique pratiquée. Réalisant ainsi le Mahamudra ou grande union. Le nom d’un certain nombre de divinités laisse aussi à penser qu’il y aurait un rapport entre des éléments tirés du kundalini yoga et cette forme de tantrisme, ainsi uchussma ou encore gundali des protecteurs, ou enfin la principale divinité irritée achalanatha, l’immuable, qui est un des noms de shiva. Il est parfois aussi représenté sous la forme d’une dragon serpentant autour d’une épée de feu. Lors de Takishugyo (ascèses) il est invoqué sous des cascades d’eau glacée. Les textes de référence de cette école bouddhiste sont le Mahavairocana tantra et le tantra du pic du vajra.

Bouddhisme tibétain

Article détaillé : Six yogas de Nāropa.

Dans le Vajrayāna, le mandala intérieur est l’anatomie du corps subtil ou éthérique, permettant la maîtrise des souffles (prāṇas), des canaux (nādīs), des gouttes (bindus), et des centres de conscience, ou roues d’énergie, appelés cakra. Les pratiques qui y sont liées spiritualisent le corps en en faisant un instrument de réalisation, et s’apparentent aux haṭha yoga et kuṇḍalinī Yoga hindous. Quant au mandala extérieur, on le déploie par le yoga de la déité (Yidam)51. Le yoga tibétain associe des techniques respiratoires, des exercices rythmiques, des pratiques mantriques ; il s’inspire des pratiques du Yogi Naropa et des exercices internes similaires au Qi Gong52.

Jaïnisme et yoga

Le tirthankara Parshvanatha en méditation yogique dans la posture Kayotsarga.

Les cultures religieuse et yogique du sous-continent indien étant fort vastes, les croyants du jaïnisme pratiquent des méditations rappelant celles du yoga : le dhyana, un exercice de concentration, fait partie des rituels quotidiens du moine-ascète jaïn. La tradition jaïne dit que tout bon croyant, s’il pratique les pujas et les autres disciplines spirituelles donnés par le jaïnisme, trouve inutile toute forme de yoga classique53. Cependant, il faut noter que le jaïnisme pourrait avoir influencé le yoga car les débuts de cette religion sont antérieurs au ixe siècle av. J.-C.54. De plus, les cinq règles morales de base du jaïnisme (ahimsâsatyaasteyabrahmacharyaaparigraha) sont exactement les mêmes que celles du Raja yogade l’hindouisme (les yama ou « disciplines » élémentaires).

Égypte et yoga

Selon Yogacharya Babacar Khane, les recherches qu’il a menées en Égypte en compagnie de son épouse, Geneviève Khane, lui ont permis de mettre en lumière la présence en Égypte d’une forme de yoga égyptien très proche du haṭha yoga de l’Inde« Le yoga égyptien comporte des postures identiques à celles de l’Inde : position du lotus, du cobra royal, du pont, de la charrue etc. mais en plus des attitudes spécifiques qui se caractérisent par leur verticalité. Ce type de yoga permet un redressement progressif de l’arbre vertébral et des épaules ; il libère tous les étages pulmonaires, permet de retrouver une capacité respiratoire normale et un regain de dynamisme et de vitalité. Les mouvements combinés, réclament une attention soutenue, développant le pouvoir de concentration et ce que la voie du ch’an appelle « la présence au présent ». »55

Végétarisme et yoga

Étant donné que le premier yama (discipline) du Raja yoga est l’ahimsâ (« non-violence » universelle), le végétarisme est une composante classique de l’exercice du yoga (car la consommation de chair animale a pour origine une violence exercée sur l’animal, blessé et tué).

Selon B.K.S. Iyengar, maître de Hatha yoga, le végétarisme est « une nécessité » dans la pratique56 : « Si des animaux tués remplissent mon assiette, ma tête et mon cœur deviennent lourds de tristesse. (…) Devenir végétarien est le chemin pour vivre en harmonie avec les animaux et la planète57. »

D’après Swami Chinmayananda, le végétarisme dans le yoga doit être accompagné d’une frugalité équilibrée :

« Consomme ce qui vient à toi facilement, qui n’attente à aucune vie, et dans une proportion qui ne chargera pas ton estomac. Ceci est la règle d’or du régime que doit suivre un adepte de la méditation58. »

Pratiques modernes dérivées

Pratiques spirituelles

  • La yoganidrā ou sommeil yogique : élaborée par Swami Satyananda Saraswati, cette technique est une forme de méditation en position allongée permettant au pratiquant d’agir sur son inconscient. L’amélioration de la qualité du sommeil est un effet de cette pratique mis souvent en avant mais n’est pas son but final59.
  • Le terme yogathérapie a été créé en 1970 par le Dr Bernard Auriol pour désigner l’usage pour la santé de méthodes et principes issus du yoga indien60.

Pratiques corporelles

  • Le Yogalates est une méthode hybride qui allie le Yoga et le Pilates, créée à la fin des années 1990 par l’australienne Louise Solomon. Elle permet le renforcement musculaire, la tonicité, la souplesse, en travaillant sur la respiration61.
  • Acrobatie et yoga : acroyoga, une discipline métissée de yoga qui combine le yoga avec l’acrobatie.
  • Goat yoga, le yoga avec des chèvres.

Effets sur la santé

Les effets sur la santé du yoga ont été étudiés scientifiquement. Des effets ont été démontrés par certaines études, mais remis en cause du fait de biais méthodologiques. Le yoga peut être recommandé pour son effet relaxant, réducteur de stress, et l’amélioration de certains symptômes du syndrome prémenstruel62. Il est considéré comme une activité ayant un faible impact, pouvant amener des bénéfices semblables à ceux d’autres exercices physiques de qualité, avec une amélioration de l’adresse et de l’état physique général, une réduction du stress et une amélioration de problèmes liés à la sédentarité. Il est particulièrement mis en avant comme physiothérapie, une activité rééquilibrant et renforçant les différentes parties du corps62.

Le yoga pourrait améliorer l’état physique des patients soignés du cancer, bien que la réalité de ces bénéfices ne soit pas encore démontrée et demande confirmation63,64. Des recherches indiquent que le yoga pourrait être utile, en complément d’autres traitements, pour traiter la shizophrénie64, et pourrait avoir des effets positifs sur la santé mentale, bien que la qualité de ces recherches est faible65.

En 2015 le Australian Government’s Department of Health a publié une étude pour déterminer si les théarapies alternatives pouvaient être remboursées par l’assurance maladie. Le yoga est l’une des 17 pratiques pour lesquelles aucune preuve d’efficacité n’a pu être démontrée66. Le gouvernement australien a donc qualifié le yoga de pratique non éligible au remboursement par l’assurance maladie, précisant que « les fonds de l’assurance maladie doivent être employés de manière appropriée et non pour des thérapies dont l’effet n’est pas prouvé »67.

Adultes

Si une partie du corps médical considère que les résultats de la recherche sur le yoga sont significatifs, d’autres signalent les nombreux biais qui entâchent ces résultats. La plupart des recherches sur le yoga consiste en des études préliminaires ou des essais cliniques de faible qualité méthodologique, avec des cohortes trop petites, une mauvaise randomisation ou une absence de protocole en double aveugle, et de hauts risques de biais68,69,70. Une étude de 2013 montre une efficacité à court terme du yoga pour les lombalgies et, avec un niveau de preuve faible, sur le long terme71. Une autre étude montre au contraire que le yoga peut provoquer ou aggraver des blessures et des douleurs lombaires72.

Des cliniciens ont cité des études étudiant les effets du yoga sur les patiens traités pour le cancer pour diminier la dépression, l’insomnie, la douleur, la fatigue et augmenter le contrôle sur l’anxiété73. D’autres ont critiqué la qualité de ces recherches, et l’incertitude de la preuve des effets74.

Une méta-étude systématique de 2016 a montré l’absence d’efficacité du yoga pour les syndromes métaboliques75.

Blessures

Des pratiquants du yoga peuvent souffrir de blessures physiques analogues à celles des sportifs. Une étude australienne de suivi de 2567 pratiquants a montré qu’environ 20 % ont été blessés pendant leur pratique du yoga. Dans les 12 derniers mois 4,6 % ont souffert d’une blessure entraînant des douleurs de longue durée ou demandant un traitement médical. Les postures sur la tête (shirshasana (en)), de la chandelle (sarvangasana), de flexions vers l’avant ou vers l’arrière, comme la posture de la charrue (halasana) ou la posture de la sauterelle (shalabhasana), et d’équilibre sur les mains, sont les positions qui ont provoqué le plus de blessures76. Plusieurs autres études ont aussi montré que le yoga peut entraîner des blessures77,78,79.

Les principales raisons évoquées par les experts tenant de cette pratique pour justifier ces effets négatifs sont l’esprit de compétition des débutants et la mauvaise qualification des instructeurs. La demande croissant, de nombreuses personnes sont certifiées instructeurs, bien qu’ayant un entraînement insuffisant. Toutes ne sont pas capables d’évaluer la condition physique d’un débutant ni de lui conseiller de ne pas abuser de certaines positions ou d’utiliser des supports adéquats pour éviter les blessures. Un débutant peut ainsi surestimer les capacités de son corps et lutter pour réaliser des positions avancées, alors que leur corps n’est pas encore assez flexible ou assez fort77.

Des dissections artérielles vertébrales peuvent subvenir de la rotation du cou lorsque celui-ci est étiré. Cela peut se produire dans de nombreuses situations, dont certaines pratiques de yoga. C’est une affection grave qui peut entraîner un accident vasculaire cérébral80,81.

Des cas de déchirures du labrum acétabulaire provoquées par la pratique du yoga ont été rapportées82.

Enfants

Comme le yoga est souvent présenté comme un excellent exercice pour les enfants, comme exercice physique ou respiratoire, pour accentuer l’attention mentale ou diminuer le stress, de nombreuses écoles américaines ont considéré l’inclure dans leurs programmes d’éducation physique. Des parents d’élèves ont intenté une action contre le district d’Encenitas, Californie, critiquant le fait que cette pratique est intrinsèquement religieuse et ne devrait pas faire partie des programmes d’éducation financés par l’État. La San Diego Superior Court Judge a rendu un avis favorable au yoga83.